Château au XIIe siècle

     
 

En 1119 suite à la campagne du Vexin qui se solda par la bataille de Brémule le Rois de France Louis VI dit Le Gros s’enfuit précipitamment pour ne pas être capturé. A l’instigation d’Amaury III de Montfort comte d’Evreux il lance alors une offensive dans le Sud de l’Evrecin qui le fait passer par Ivry qu’il assiège. Après plusieurs assauts la ville est prise et le château incendié. Les historiens, Suger de Saint Denis et Orderic Vital, ne nous rapportent pas l’ampleur des dégâts mais il semble que l’ensemble ait pu conserver un système de défense compatible au contexte historique et de ce fait qu’il ait pu résister au temps car il faut attendre presque la fin du XIIe siècle pour que la forteresse subisse de nouvelles transformations. 

Toute partie orientale de l’édifice fait l’objet de modifications majeures, l'angle Nord-Est est entièrement refaçonné et deux tours de flanquement sont construite pour renforcer la défense des parties latérales (Est et Ouest) de  la forteresse.

 
 

L’abside (pointillé rouge sur le schéma ci-dessous) formée par la tour donjon édifié au siècle précédent est rasé jusqu’en dessous du sol et une partie de sa nef en croisée d’ogive de la chapelle basse (zone dite chapelle aujourd’hui) est bouchée par un mur en maçonnerie afin d’implanter aux étages supérieurs un donjon et une tour d’angle circulaire édifiée au croisement des deux nouvelles courtines talutées. 

Les courtines sont implantées en chemise autour d'une tour maîtresse formant le donjon. Elles ont pour but de préserver un espace suffisant afin de former une gaine de défense constituée de deux galeries voûtées jalonnées d’archères. A l’Ouest la courtine est presque à la verticale en raison de l’exiguïté de place en débord de la tour maîtresse tandis qu’au Nord la courtine s’élève sur un talus moins pentu.

"emprise chateau xiie siecle"

 
 

Evolution de la  façade orientale au XIIe siècle

 Légende des schémas d'évolution ci-contre

 Phase 1 Plan du château à la fin du XIe siècle

 Phase 2 construction du nouveau donjon et de la gaine de  défense au dessus de l'ancienne chapelle

 Phase 3 Construction de la tour flanquante ou tour de flanquement

 Phase 4 Construction des bâtiment en fausse braie le long   de la face orientale.

 
 

Plan de la gaine de défense

Côté Est la gaine de défense part de la salle situé au-dessus du cellier correspondant à la chapelle basse puis elle suit, en tournant dans le sens des aiguilles d'une montre, un tracé en trois segments correspondant à celui de la courtine orientale avec un retour sur les structures originelles de l’édifice.

Sur la paroi côté interne du premier segment on distingue nettement trois niches en forme de berceau brisé.Très probablement situées en face d'une archère ces niches avaient deux utilités::

  • d'une part elles servaient de dégagement au archers pour bander leur arc dans cette courtine très étroite (90 cm).
  • d'autre part elles pouvaient servir de banc de repos ou de veille 

d'ou leur nom de "banc d'assise" qui leur parfois est donné par similitude avec ceux placés dans les alcôves formées par les archères ou meurtrières.. 

 
 

  

Illustration montrant un archer en action dans la gaine de défense (on remarquera derrière lui le banc d'assise)  et vues des vestiges de la gaine de défense du château d'Ivry tels qu'ils sont visibles aujourd'hui

 
 

Dans le second segment on peut remarquer le logement d’un vantail tandis que le long du dernier segment on distingue nettement une niche en forme de berceau brisé.Très probablement située en face d’une archère elle servait de dégagement et de banc d'assise pour le repos des archers comme dans le premier tronçon.

La plateforme de la tour circulaire qui forme l’angle Nord et sert de jonction entre les deux parties de la gaine de défense est de faible dimension. Dans les années 1970, au-dessus du chanfrein en pierre situé sur la partie extérieure du mur de la tour on pouvait encore distinguer une archère dirigée vers le Nord.

Sur les façades Nord et Est le parcours de la gaine de défense était interrompu par plusieurs portes s’ouvrant cloisonnant la gaine. Bien que ce passage n’existe plus on remarque dans le parement côté Sud le logement d’un boulin servant à le sécuriser. Juste avant figurent trois niches semblables et à même vocation que celle déjà décrite côté oriental. Face à elles figuraient des archères percées dans un mur de faible épaisseur. 

La zone située juste derrière la gaine de défense est totalement restructurée de façon à former une petite salle carrée. On y pénètre par ce qui constitué sans doute l’ancien accès à la chapelle au niveau du premier étage de la tour d’origine. Ce  passage est  absent de tout dispositif de fermeture laissant la communication libre.

 
 

Totalement aveugle cette petite pièce carrée comporte en partie supérieure un trou de boulin signalant qu’il y eut la présence d’un second  étage. En hauteur dans l’angle Nord-Est un seuil de porte borné de pieds droit ainsi que deux marches indiquent l’accès à un étroit passage coudé qui donne accès à une galerie défense similaire à celle du 1er étage. Rien ne permet aujourd’hui de dire combien de niveaux l’ensemble était constitué mais il n’est pas impossible de penser qu’il y en eut au moins de défense dotés d’un système de défense similaire.

 
 

Côté oriental une tour de flanquement est collée à la façade de la tour résidence initiale englobant l’un des imposants contreforts d’origine. De taille identique à sa sœur jumelle créée au siècle précédant côté occidental elle se caractérise par une épaisseur de mur plus importante 2,30 m.

Si on ne décèle aucun passage ayant pu exister avec la tour d’origine on est surpris par la présence à son niveau bas d’un passage voûté en berceau surbaissé de près d’un mètre de largeur communiquant avec l’extérieur. Ce dernier ne possédant aucun dispositif de fermeture il semble qu’il est était conçu pour accéder à la coursive qui recouvre une braie ou fausse braie construite en même temps afin de renforcer le dispositif de défense la façade orientale.

 
 

  

            Passage voûté sur la braie              Contrefort et mur dans la  tour                   Braie ou en prolongement de la tour de flanquement

 
 

Vue de l'arc de décharge (partie haute de la photo) et de l'emprise de l''archère de la fausse braie au premier plan au bas de la photo

La braie ou fausse braie s’étend le long du mur oriental de la tour d’origine en allant vers le Sud.

Aujourd'hui presque totalement dérasées les parties bâties restantes que l'on peut distinguer au sol et qui formaient la braie ou fausse braie était assez élevées et dotées de meurtrières dominant le versant Est.

L'emprise au sol laisse apparaître une fausse rectangulaire, de 5,50 m de  long sur 3,30 m de large, avec un passage de circulation étroit en bout des murs de refend qui borne de part et d’autre l’espace. L’un des passages débouche dans un petit espace juste avant la tour de flanquement tandis que l’autre, maintenant muré, débouche vers un espace plus réduit formant un couloir qui englobe les reste d’un pilastre puis va en s’amenuisant jusqu’à rejoindre l’enceinte originelle de la cour Sud.

Actuellement au ras du sol dans l’épaisseur du mur de la braie ou fausse braie on peu remarquer la l'appareillage de pierres correspondant à la structure inférieure d’une meurtrières ce qui signifie que l’assise de la braie ou fausse braie est encore plus bas et qu'elle n’est pas encore dégagée. Face à cette meurtrière sur la paroi du fond qui forme un léger angle on distingue en partie haute les vestiges d’’un arc de décharge avec l’amorce du pilastre centrale. Cet élément confirme la présence d’une courtine au niveau supérieur qui pour résister aux assauts (notamment au travail de sape) était soutenu par des arcs de décharge qui reportaient le poids des maçonneries sur des points isolés afin de maintenir et renforcer la coursive et son parapet.

 
   
  Les dessins, plans, relevés architecturaux et images 3D de la forteresse figurant dans ces pages ont été réalisés par : Mr Robert BAUDET initiateur du projet de réhabilitation et réalisateur des premiers travaux de dégagement en 1968, Jean MESQUI Ingénieur des ponts et chaussées spécialiste de châteaux du Xe au XVe siècle, Éric Follain Docteur en archéologie artiste numérique et Dominique PITTE suite aux opérations de déterrement et de fouilles du château initiés en 1968 par le Club Archéologie, L'ensemble est le résultat des études et recherches réalisées par l’association les Vieilles Pierres sous l'égide de la Direction Régionale des Affaires Culturelles (DRAC) depuis 1989.